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Philosophie, écologie, politique. Florent Bussy, Professeur de philosophie.
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13 décembre 2019

Présentation Ce qui nous fait Quiberville sur mer

Compte-rendu du Café philo N°2 Café-librairie Le Lutin, Quiberville sur mer (76) le 6 décembre 2019  Par Pierre Legrand

10 participants

Florent BUSSY a présenté son livre et a voulu expliciter le titre : Ce qui nous fait et le sous-titre : avènement de l’homo ecologicus. Pour mener à bien son projet d’écrire un traité d’écologie philosophique, il y a la volonté pour Florent de faire une histoire et une critique de ce que les Modernes ont amené comme transformation du rapport de l’homme à la nature. Les Modernes emmenés par DESCARTES (voir l’annexe n°1 ci-dessous) n’ont eu de cesse de repousser les limites de la connaissance et de l’action humaine pour échapper à une nature vécue comme un esclavage (alors que l’homme est aussi un être de nature et lutter contre la nature, c’est aussi lutter contre soi-même).

Qu’en est-il de ce rapport aux limites de nos jours ?

Repousser les limites du temps et le futur devient le présent

Repousser les limites de l’espace et le lointain devient le tout proche

Repousser les limites de la mort et l’immortalité un avenir promis par la guérison de la mort grâce à la science conquérante (et notamment la génétique).

En repoussant les limites, les qualités humaines risquent de modifier les caractéristiques humaines ; ce qui nous fait et fait de nous un animal terrestre.

Comment ne pas évoquer les méfaits du libéralisme qui fait de l’homme un individu déterminé seulement par lui-même (self made man) et par ses possibilités d’acquérir des biens et des services qui vont constituer une identité sans cesse repoussée par les nouvelles offres du marché ?

Ainsi s’affrontent deux visions du rapport de l’homme à la nature :

Celle du transhumanisme avec la promesse de l’immortalité pour certains (lesquels ? ceux qui pourront payer cette hypertechnique médicale), avec l’hypothèse d’un départ avers une autre planète après épuisement de la nôtre. Ce sont en fait des délires scientistes car la réalité de la science rend impossible une modification génétique abolissant le vieillissement et la mort et encore plus les voyages inter-stellaires qui devraient durer des siècles.

Celle d’une fidélité à la condition humaine (à distinguer de la nature humaine, concept trop flou car l’homme n’est pas seulement un être de nature)

C’est cette seconde voie que Florent nous invite à suivre dans son travail.

Ce qui détermine l’humain, c’est son lien à la condition mortelle et donc à la sexualité comme un prolongement trans-générationnel par la transmission de la vie. Cette condition humaine rend essentiels les liens : les liens de la filiation, les liens de la culture. Un homme ne se fait pas tout seul, il reçoit un don de ses parents et de sa culture. En contrepoint ; l’individu transhumaniste pourrait naître sans parent d’un utérus artificiel et sa sexualité serait

totalement détachée de la reproduction, il serait alors plutôt en survie que véritablement en vie.

Les liens qui nous font, nous permettent d’être accompagnés dans l’épreuve de la vie sans pour autant annuler le tragique de notre condition mortelle. Est-ce une consolation ou plutôt une acceptation heureuse de cette condition ?

Respecter nos limites, c’est réinvestir notre lien à la nature en sortant de l’idée d’être en opposition avec elle. La crise écologique ne sera pas alors vue comme une vengeance de la nature à notre prédation des ressources mais comme l’occasion de resituer notre complémentarité avec la nature.

Dans le débat qui a suivi la présentation de Florent, plusieurs thèmes ont été abordés :

Les vrais besoins :

S’il est admis que la restriction de notre prédation sur la nature nécessite une réduction de nos besoins et de nos désirs, il reste difficile de cerner ceux qui sont fondamentaux et ceux qui sont accessoires sans tomber dans une position normative voire dictatoriale. On peut se référer à certaines philosophies comme celle des épicuriens (voir annexe n°2) ou bien avoir une position plutôt utilitariste en disant qu’un vrai besoin est celui dont la satisfaction ne provoquera aucun dommage conséquent à autrui et à la nature.

La sobriété et les excès :

La sobriété avec son côté passion triste n’est pas souvent retrouvée dans l’histoire de l’humanité faite de tous les débordements, de tous les excès (guerres, conquêtes, révoltes…) Et pourtant, chaque crise s’est toujours résolue par une période de réunion des parties qui s’étaient affrontées dans un nouveau pacte social. La crise avec ses excès peut donc être maturative d’une plus grande sociabilité avec des dégâts collatéraux parfois massifs par le nombre de victimes.

L’entraide :

L’homme est-il un loup pour l’homme ou bien est-ce l’amour qui unit les groupes ?

Il semble que sans l’entraide, aucune survie de l’humanité n’aurait été possible ? Il ne peut y avoir d’humanité faite de loups solitaires. Certes, il existe une puissante possibilité de haine de l’étranger, de celui qui n’est pas comme nous mais il existe aussi une pulsion de générosité voire de désintéressement pouvant aller jusqu’au sacrifice de soi pour un idéal. Une différence a été faite entre la charité qui n’attend rien de l’autre et la réciprocité de l’entraide. La question du don qui peut humilier le récipiendaire s’il n’a pas la possibilité de faire un contre-don, a été abordée.

 

La prise de conscience individuelle, les gestes du colibri et la politique :

C’est un thème récurrent en matière d’action écologique en opposant l’action individuelle faite des petits gestes du quotidien et les résultats d’une action collective passant par la politique et les institutions. Or, il semble que seule la conjonction des prises de conscience individuelle par des citoyens ait une efficacité supérieure à celle de l’action politique qui reste balbutiante. On peut dire que les deux axes doivent concourir à des résultats positifs : l’action individuelle et l’action politique. On peut ajouter un échelon intermédiaire par la mise en œuvre d’une intelligence collective sur des petits groupes comme notre café philo !

L’angoisse de l’après pétrole :

Le pétrole est une matière magique qui pouvait être extrait, transporté et transformé assez facilement. Sa transformation en énergie pour divers usages et principalement pour se déplacer a façonné toute notre civilisation. Devoir s’en passer nous laisse dans une angoisse sans réponse. Le remplacer par une autre matière première naturelle ne ferait que déplacer une prédation par une autre.

Les paradigmes de l’éducation :

L’éducation produit les modes futurs de socialisation et la société produit les modes d’apprentissage dans un cercle qui peut être vertueux ou vicieux. Les enseignants de notre groupe déplorent une culture de la performance avec recherche de la note plus qu’une culture de la connaissance. Cette recherche d’être évalué est à l’image des valeurs de notre société. L’élève est devenu un consommateur d’objet de connaissance pour augmenter sa valeur sur le marché du travail. Et pourtant, toute modification profonde des valeurs doit commencer par l’éducation.

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